Retour à l'histoire de quelques FAI

----------------------Histoire d'AOL aux USA

     
 

1983-1991: premières années

En 1983 William von Meister fonde l'entreprise Control Video Corporation. Son seul produit était un service en ligne appelé GameLine pour la console de jeux vidéo Atari 2600.

En janvier 1983, Steve Case est embauché comme consultant en marketing par Control Video alorst en grandes difficultés. En mai 1983, Jim Kimsey devient consultant en fabrication pour la société. Au début de 1985, von Meister quitte l'entreprise.

Le 24 mai 1985, après une restructuration et un nouveau cycle de financement, Control Video renaît sous le nom de Quantum Computer Services, avec Jim Kimsey, président fondateur. Steve Case rejoint la société et est promu vice-président exécutif en 1987.

Quantum lance un service en ligne dédié aux ordinateurs Commodore, appelé Q-Link, le 1er novembre 1985. En mai 1988, Quantum et Apple lancent AppleLink Personal Edition pour ordinateurs Apple II et Macintosh. En août 1988, Quantum lance PC Link, un service pour les PC compatibles IBM développé en joint-venture avec la société Tandy. La société se sépare d'Apple en octobre 1989.

Quantum Computer Services change de nom en octobre 1991, devenant America Online. Steve Case a alors promu et vendu AOL comme assurant la fourniture de services Internet en ligne moyennant abonnement pour les personnes peu familières avec les ordinateurs, contrairement au concurrent CompuServe qui était bien établi dans la communauté technique.

1991-2006 : ère d'Internet, l'incroyable essor

En février 1991, AOL pour DOS est lancé, suivi un an plus tard par AOL pour Windows. Cela a coïncidé avec la croissance des services en ligne payants concurrents, comme Prodigy, CompuServe et GEnie (créé par General Electric).

Au début des années 1990, les publicités invitaient les propriétaires de modems à "Try America Online !" (kit), offrant un logiciel gratuit et un abonnement d'essai. En septembre 1993, AOL a ajouté l'accès Usenet à ses fonctionnalités. AOL a interrompu Q-Link et PC Link à la fin de 1994.

Embauchée en 1993 en tant que vice-présidente marketing dans le but de développer la base d'abonnés, Jan Brandt a eu carte blanche sur les stratégies marketing d'AOL.

AOL avait commencé à envoyer des disquettes gratuites aux personnes qui en faisaient la demande, Jan Brandt a mis en place une campagne de marketing direct pour distribuer des disquettes d'installation AOL par la poste. Forte de la conviction qu'il était presqu'impossible à quelqu'un qui a reçu une pochette ou une petite boîte par la poste de ne pas être tenté de l'ouvrir, et ainsi fournir aux gens le disque d'installation AOL pour les amener à essayer le service, Jan Brandt a obtenu le feu vert de son patron, Steve Case, pour expérimenter une campagne de publipostage. La campagne d'essai a coûté 250 000 $, mais a eu un taux de réponse moyenne de plus de 10 %, certaines listes de diffusion pouvant atteindre 16 à 18 %, ce qui était phénoménal. Cela a incité AOL à pérenniser et internationaliser la formule ainsi qu'à étendre la campagne au-delà du publipostage direct en travaillant aussi avec des partenaires de distribution non conventionnels, tels que des compagnies aériennes et des sociétés céréalières (kit). À un moment donné, les CD-Rom ayant remplacé les disquettes, on estime que 50% des CD produits dans le monde avaient un logo AOL.

Cette stratégie de "carpet bombing" (le tapis de bombes) a joué un rôle déterminant dans la domination par AOL du marché des fournisseurs de services en ligne. AOL atteint 1 million d'abonnés en 1995, mais 5 millions dès 1996. Aux USA, AOL a donc rapidement dépassé GEnie, et au milieu des années 1990, Prodigy et CompuServe. Dans pratiquement tous les pays où AOL s'est implanté, l'envoi par la poste de millions de kits de connexion internet est constaté.

AOL a lancé des services d'éducation en ligne avec de nombreux organismes. AOL a proposé le premier service d'aide aux devoirs en temps réel (le Teacher Pager, 1990), le premier service par les enfants pour les enfants (Kids Only Online, 1991), le premier service en ligne pour parents (le Parents Information Network, 1991), les premiers cours en ligne (1988), le premier service omnibus pour les enseignants (le Teachers' Information Network, 1990), la première exposition en ligne (Library of Congress, 1991), les premiers contrôles parentaux.

Lorsque Jim Kimsey a pris sa retraite en 1995, Steve Case est devenu PDG de la société.

AOL a acheté le moteur de recherche WebCrawler en 1995, mais l'a vendu à Excite l'année suivante ; l'accord a fait d'Excite le seul service de recherche et d'annuaire sur AOL. Après la conclusion de l'affaire en mars 1997, AOL a lancé son propre moteur de recherche de marque, basé sur Excite, appelé NetFind, renommé AOL Search en 1999.

AOL facturait à ses utilisateurs un tarif horaire. Mais, en décembre 1996, la société est passée à " unlimited AOL & Internet " pour un tarif mensuel fixe de 19,95 $ (kit). A ce moment, les serveurs AOL ont été inondés d'utilisateurs essayant de se connecter, et même si beaucoup ont annulé leur compte en raison de lignes constamment occupées, en trois ans la base d'utilisateurs d'AOL est passée à 10 millions de personnes.

AOL manqua rapidement de place pour son activité au 8619 Westwood Center Drive à Vienna, Virginie (kit). Au milieu de l'année 1996, AOL a déménagé au 22000 AOL Way à Dulles, toujours en Virginie (kit).

En 1997, environ la moitié des foyers américains ayant accès à Internet l'avaient via AOL. Parallèlement, les chaînes de contenu d'AOL, y compris Info, Sports et Divertissement (kit), ont alors connu leur plus grande croissance tandis qu'AOL devenait le service en ligne dominant au niveau international avec plus de 34 millions d'abonnés.

En février 1998, John W. Sidgmore, alors vice-président de WorldCom, a conçu une transaction complexe qui a satisfait toutes les parties prenantes. Première étape : WorldCom a acheté toutes les actions de CompuServe avec 1,2 milliard de dollars d'actions WorldCom. Le lendemain, WorldCom a vendu la partie CompuServe Information Service de la société à AOL, en conservant la partie CompuServe Network Services. AOL a à son tour vendu sa division réseau, Advanced Network Services (ANS), à WorldCom. Ainsi, AOL s'occupe des services d'information et WorldCom s'occupe des réseaux.

En juin 1998, AOL achète Mirabilis, la société fondatrice d'ICQ, logiciel de messagerie instantanée. La messagerie instantanée est beaucoup plus rapide que le courrier électronique car, contrairement à ce dernier, elle permet à l'utilisateur de savoir si l'autre usager est en ligne et de mener une conversation instantanée. On en trouve une merveilleuse utilisation dans le film romantique " You've Got Mail " (" Vous avez un Mess@ge " en France) avec Tom Hanks et Meg Ryan (kit)

En novembre 1998, pour répondre à l'arrivée des fournisseurs d'accès à Internet qui offraient une passerelle d'entrée à tous les sites Web sans limitation, AOL s'empare de Netscape, logiciel de navigation sur Internet, pour 4,2 milliards de dollars.

Au début de l'année 2000, AOL, dont l'activité est la fourniture de services Internet en ligne, est dans la situation suivante. Ses services comprennent :
- les fournisseurs de services Internet ("FSI") qui proposent la connexion par modem commuté ("accès par ligne commutée") et donc bas débit ainsi qu'une gamme de contenus. Les FSI sont trois services sur abonnement : AOL, CompuServe et Netscape Online (ce dernier au Royaume-Uni). Au total, ces FSI représentent 27 millions d'abonnés, dont 4,3 millions en Europe et en font le leader mondial. AOL a gardé ses caractéristiques originales. Au lieu de se contenter de fournir un portail d'accès à des contenus logés un peu partout sur l'Internet, AOL propose un contenu très abondant et facile d'emploi. Une partie du contenu et des services connexes (forums, magazines, groupes de discussion, bases de données de référence et services d'information) proposés par AOL sont protégés et réservés aux seuls abonnés.
- AOL propose en outre 2 services de messagerie instantanée: AOL Instant Messenger et ICQ, qui comptent respectivement 61 et 70 millions d'utilisateurs.
- Les autres services Internet proposés par AOL sont les suivants: - AOL.com et Netscape Netcenter, deux grands portails Internet, - le réseau local de contenu et guide des utilisateurs du service AOL et Internet Digital City (Digital City est un guide touristique et de loisirs pour les principales villes des États-Unis), - AOL MovieFone, le plus grand guide de films et service de billetterie en ligne, - MapQuest.com, un service de voyage qui donne des cartes routières et des instructions de conduite, - les services de distribution de musique en ligne Shoutcast, Spinner et Winamp. Ces services sont accessibles "publiquement" aux utilisateurs de l'Internet via les sites mondiaux d'AOL.
- AOL exploite un certain nombre d'entreprises communes en Europe. AOL Europe, une entreprise commune détenue pour moitié par AOL et pour moitié par le groupe de médias allemand Bertelsmann, fournit des services FSI dans neuf pays d'Europe (Belgique, Allemagne, Espagne, France, Italie, Pays-Bas, Autriche, Suède et Royaume-Uni). En France, AOL Europe est une entreprise commune constituée par AOL, Bertelsmann, et le groupe français Vivendi (par sa filiale de télécommunications Cegetel et la chaîne de télévision cryptée Canal Plus, dont Vivendi est l'actionnaire majoritaire). Netscape Online est un service Internet proposé au Royaume-Uni.
- AOL propose également des logiciels, dont le logiciel de navigation Netscape, une assistance technique, ainsi que des services de conseil et de formation à l'intention des clients professionnels par le biais de Netscape Enterprise Group. Cette offre est commercialisée conjointement avec Sun Microsystems.

Le 10 janvier 2000, au plus fort de la bulle Internet, Steve Case, PDG d'AOL, et Gerald Levin, PDG de Time Warner, annoncent leur intention de fusionner leurs entreprises, pour former AOL Time Warner Inc. La fusion est représentée comme une acquisition. C'est AOL, à peine âgé de 15 ans, qui absorbe le numéro un mondial des médias, dont la capitalisation était inférieure de moitié à celle de son "prédateur", bien qu'AOL n'ait réalisé en 1999 qu'un chiffre d'affaires de 4,8 milliards, alors que Time Warner a affiché des ventes de 26,8 milliards.

L'opération prendra la forme suivante: AOL et Time Warner fusionneront chacune avec de nouvelles filiales d'une nouvelle société holding, AOL Time Warner. À l'issue de ces fusions, AOL et Time Warner deviendront des filiales à 100 % d'AOL Time Warner. Cette transaction record, qui prendra la forme d'un échange de titres, verra les actionnaires de Time Warner, qui recevront 1,5 action d'AOL Time Warner pour chacun de leurs titres, détenir 45 % du nouvel ensemble. Ceux d'America Online, majoritaires à 55 %, verront simplement leurs actions changer de nom. La société affichera immédiatement une capitalisation boursière de 350 milliards de dollars et un chiffre d'affaires annuel supérieur à 30 milliards de dollars.

Le deal fournit à AOL, qui compte déjà aux Etats-Unis plus de 20 millions d'abonnés via ses services Internet AOL et Compuserve, un accès haut débit avec les 13 millions d'abonnés au câble de Time Warner, renforçant ainsi sa position de numéro un national de fournisseur en ligne.

L'accord a été conclu le 11 janvier 2001, la fusion nécessitant l'obtention des autorités en charge de la concurrence aux Etats-Unis et en Europe. AOL Time Warner devient le premier groupe de médias mondial. Cette fusion consacre de fait le mariage de la nouvelle économie, avec AOL, premier fournisseur d'accès mondial sur le Net avec 29 millions d'abonnés, et la " vieille économie ", représentée par le séculaire éditeur Time Warner.

Fermement ancré à son modèle d'abonnement payant sur Internet, AOL a ainsi voulu s'assurer l'appui de contenus forts pour alimenter ses services. Après avoir proposé d'abord une alliance à Bertelsmann, qui l'a déclinée, le fondateur d'AOL s'est tourné vers Time Warner, candidat paraissant idéal puisqu'il présente une heureuse combinaison entre le cinéma (le studio Warner Bros), les chaînes de télévision (CNN et HBO), le câble (Road Runner) mais aussi la musique et la presse (autour de Time Magazine).

Début 2001, AOL-America Online est alors N°1 mondial. Avec près de 30 millions d'abonnés dans le monde, AOL, qui concentre la très grande majorité de sa clientèle aux États-Unis, fait figure d'exception sur l'échiquier mondial de l'accès Internet. Le FAI est alors implanté dans 16 pays et a déployé son propre environnement Internet (navigateur, messagerie, e-mail...) lui permettant d'avoir une stratégie très captive auprès de sa clientèle. Après avoir récupéré les abonnés de Netscape et de Compuserve, AOL, maintenant allié à Time-Warner, prend le virage de la communication globale, où musique, télévision, cinéma et services seront amenés à être déclinés sur différents supports.

Même si Time Warner devait fournir initialement environ 70% du flux de bénéfices de la société fusionnée, AOL en détient la majorité des actions en raison de la valeur que Wall Street accordait au potentiel de croissance d'Internet en janvier 2000. AOL était valorisé alors, pour 4,8 milliards de chiffre d'affaires en 1999, à 164 milliards de dollars avec un cours représentant 214 fois son résultat par action, alors que Time Warner, pour des ventes de 26,8 milliards est valorisé à quelque 97 milliards de dollars. La bulle spéculative Internet qui s'était constituée finit par éclater à partir de mars 2000. Après la dégringolade des sociétés Internet en Bourse, ce qu'avait acquis chèrement AOL à l'époque vaut désormais beaucoup moins au plan comptable. Le nouveau groupe a donc dû inscrire 54,2 milliards de dollars de pertes dans ses comptes au premier trimestre 2002 pour refléter cette brutale dépréciation d'actifs. Si ce dépoussiérage comptable avait bien été annoncé à la fin 2001, les résultats du pôle Internet (AOL) ont stagné et même la progression du nombre d'abonnés a déçu.

Les résultats trimestriels suivants du groupe confirment que la croissance revient désormais aux activités historiques de Time Warner (cinéma, musique, édition, télévision et câble). Ces dernières enregistrent des progressions annuelles significatives, tandis que la partie AOL a un chiffre d'affaires stagnant ou en recul. Alors qu'AOL, fer de lance de la fusion avec Time Warner, devait servir de relais de croissance au groupe grâce à Internet, cela ne s'est guère matérialisé dans les comptes en 2001, et ce ne sera toujours pas le cas en 2002. Pourtant, aux Etats-Unis, le service AOL atteint son sommet en septembre 2002 avec 26,7 millions d'abonnés.

Pire encore, AOL, malgré ses 35 millions d'abonnés, se retrouve sous la menace de MSN et de Yahoo. Alors que AOL concentre majoritairement son accès sur le téléphonique (bas débit) avec des tarifs élevés, MSN (9 millions d'abonnés) et Yahoo associé à SBC (1 million d'abonnés) ont choisi d'attaquer le marché en s'appuyant sur des offres commerciales plus agressives et en misant sur le haut débit. Une stratégie qui pourrait faire la différence tant l'intérêt des internautes pour l'accès haut débit est en train de décupler.

Cette fusion qui a créé AOL Time Warner s'avèrera un échec complet. Annoncée le 12 janvier 2003, la démission de Steve Case, président du conseil d'administration d'AOL Time Warner, sonne le glas de la prédominance d'AOL sur Time Warner et d'Internet sur les médias traditionnels. Il sera remplacé par Richard " Dick " Parsons.

Fin janvier 2003, la publication des résultats 2002 est l'occasion de mesurer l'ampleur du désastre. Sur le quatrième trimestre 2002, le groupe accuse une perte nette de 44,9 milliards de dollars (contre 4,9 milliards en 2001), dont 45,5 milliards issus de la dépréciation d'actifs essentiellement liés à la fusion avec AOL. Suite aux 54 autres milliards de dépréciation d'actifs intégrés au premier trimestre 2002, cela porte à près de 100 milliards de dollars la perte nette du groupe sur l'année écoulée. La plus grande perte jamais affichée par une entreprise américaine, l'équivalent du PIB de l'Irlande !

Alors que toutes les divisions sont en progression, la branche AOL voit son chiffre d'affaires annuel reculer de 4 % à 9,1 milliards de dollars et son Ebitda plonger de 22 % à 1,8 milliard. Les revenus d'AOL liés aux abonnements payés par les internautes ont progressé de 16 % en 2002 avec un parc de 35,2 millions d'abonnés, dont 2 millions supplémentaires en un an. Sur ce total, 26,5 millions d'abonnés proviennent des États-Unis (dont 1,2 million de nouveaux clients) et 6,4 millions d'Europe (825 000 clients en plus). En dehors de ces deux zones, AOL affiche une perte de 100 000 abonnés en 2002. Les revenus d'AOL issus de la publicité (vente d'espaces publicitaires) et du commerce (commissions prélevées sur les ventes d'objets en ligne) s'affichent à l'inverse en recul annuel de 39 %. Au final, le FAI ne représente qu'un cinquième de l'activité du groupe.

En avril 2003, AOL Time Warner décide de payer en cash 812,5 millions de dollars à Vivendi Universal pour récupérer les actions privilégiées AOL Europe. Le groupe français détenait ces titres depuis sa sortie du capital d'AOL France en mars 2001. Si cette opération va creuser l'endettement du géant de la communication, cette manœuvre est stratégique pour AOL Time Warner : avec le désengagement parallèle de son deuxième grand allié européen Bertelsmann, le groupe de communication américain va retrouver le contrôle intégral de sa filiale AOL Europe.

En septembre 2003, le groupe AOL Time Warner s'est finalement décidé à supprimer AOL de sa dénomination pour ne plus être que "Time Warner" afin de mieux séduire les investisseurs et de moins mettre en avant une activité FAI en perte de vitesse.

Devenu PDG d'AOL en août 2002, Jonathan Miller a poursuivi une stratégie de réduction des coûts et de concentration sur l'amélioration des revenus publicitaires par rapport à l'activité d'abonnement (comme fournisseur d'accès Internet), activité alors dominante d'AOL. En juin 2004, AOL rachète Advertising.com, une société spécialisée dans le marketing en ligne, pour un montant de 435 millions de dollars. En 2006, Miller préside au licenciement de 5 000 personnes chez AOL.

Les bénéfices de cette nouvelle orientation ne sont pas immédiats. Les revenus publicitaires progressent de 33% en 2005, mais le FAI perd toujours des abonnés en raison des prix attractifs sur le haut débit pratiqués par la concurrence. Là encore, la stratégie bas débit que le FAI a longtemps menée impacte lourdement son développement, quand ses concurrents se sont plus rapidement tournés vers des offres ADSL. Le nombre d'abonnés AOL dans le monde ne cesse de s'éroder. De 28,9 millions fin décembre 2004, ceux-ci passent à 25,8 millions fin 2005, soit un recul de près de 11%. Cette baisse est particulièrement sensible aux Etats-Unis où le nombre d'abonnés est passé de 22,3 à 19,5 millions, soit un fléchissement de 12,5 %. En revanche, en Europe, l'érosion n'est que de 4,5 %, le nombre d'abonnés au FAI passant de 6,3 à 6 millions. Malgré la signature de partenariats avec Verizon Communications, AT&T, BellSouth, Qwest Communications et Neuf Cegetel en France, destinés à combler son retard en matière de dégroupage total et à s'aligner sur les prix de la concurrence, cette désaffection des abonnés se poursuit et avec elle la chute du revenu des abonnements.

2006-2009: changement de marque et déclin

Après quinze années d'utilisation de la marque America Online aux États-Unis, la société décide le 3 avril 2006 de renommer la société AOL afin d'adopter la marque AOL qui était jusqu'alors principalement utilisée sur ses services en Europe.

Le 16 novembre 2006, Randy Falco succède à Jonathan Miller en tant que PDG. En décembre 2006, AOL ferme son dernier centre d'appel restant aux États-Unis, enlevant l'Amérique d'Amérique en ligne ! Ce sont les centres de service basés en Inde et aux Philippines qui continuent de fournir un support client et une assistance technique aux abonnés.

En tant que PDG, Randy Falco a défini la stratégie et supervisé les opérations alors que l'entreprise passait à un modèle commercial axé sur la publicité. Il écrira " Nous modifions fondamentalement l'activité d'AOL. Nous ne sommes plus une entreprise d'abonnement. Nous sommes une entreprise Web financée par la publicité ". Dans cette restructuration, Falco a réalisé 16 acquisitions stratégiques, éliminé 2,5 milliards de dollars de coûts et déplacé le siège social d'AOL de Dulles à New York (Manhattan). La restructuration comprend également une série de licenciements massifs.

Début août 2006, Time Warner fait le pari d'un modèle économique reposant uniquement sur les revenus de la publicité en annonçant qu'AOL va offrir ses services gratuitement. AOL ne compte alors plus que 23,3 millions de clients au 30 juin (dont 76% aux Etats-Unis) qui paient des abonnements mensuels pour un accès Internet via AOL. Désormais, toute personne disposant d'un accès Internet haut débit pourra utiliser gratuitement le logiciel AOL et conserver son adresse électronique AOL.com, sa messagerie instantanée et ses outils de sécurité (filtre de contrôle parental et logiciels de protection contre les virus et les publicités intempestives). De cette manière, AOL espère ainsi conserver un lien avec ses anciens clients et conserver de l'audience sur ses pages malgré la fuite continue de ses abonnés qui migrent vers le haut débit. AOL en a perdu 1,2 million au deuxième trimestre 2006.

AOL a perdu jusqu'à 9 millions d'abonnés au cours des quatre dernières années, car les personnes qui s'abonnent au service haut débit ne voient aucune raison de continuer à payer pour AOL. Cependant, de nombreux membres d'AOL ont conservé leur adhésion à AOL parce qu'ils ne voulaient pas perdre leurs adresses e-mail AOL. Pour arrêter de payer pour le service AOL, les clients doivent appeler le service client au 888-265-8008. Ils ne peuvent pas le faire en ligne ou par e-mail. Le passage du payant au gratuit vise également à ralentir le taux d'abonnés annulant leurs comptes et passant à Microsoft Hotmail, Yahoo!, Google ou d'autres fournisseurs de messagerie gratuits. En décembre 2007, Randy Falco se satisfera que " L'équipe Access a également fait un excellent travail cette année, en particulier dans ses efforts pour migrer les membres payants vers AOL gratuit. Lorsque nous sommes arrivés ici, notre taux de conversion du payant au gratuit était d'environ 40 % - aujourd'hui, il est supérieur à 80 %. C'est une réalisation remarquable et ces utilisateurs gratuits ont été un élément clé dans nos efforts pour stabiliser nos pages vues ".

Par ailleurs, AOL annonce qu'il ne fera plus la publicité du service commuté, accès bas débit (dial-up) qui coûte à l'abonné de 9,95 $ à 25,90 $ par mois, pour réaliser des économies d'un milliard de dollars par an. AOL estime qu'il gagnera plus d'argent en augmentant ses revenus publicitaires. Marché de la publicité en ligne dominé actuellement par Yahoo et Google. Cela va se traduire par une quasi-disparition des kits de connexion Internet AOL. Je n'en possède que 4 postérieurs à juillet 2007.

Ce même mois d'août 2006, Time Warner publie ses résultats trimestriels. Concernant AOL, si le chiffre d'affaires est en baisse, les revenus publicitaires de la filiale de Time Warner progressent de 40%. De quoi conforter sa stratégie d'abandon quasi-total de l'activité d'accès à Internet pour se consacrer à la diffusion de contenus en ligne.

En Europe, AOL conclut la vente de ses filiales Internet ; en Allemagne à Telecom Italia (17 septembre 2006), en France à Neuf Cegetel (21 septembre) et en Grande-Bretagne à Carphone Warehouse (11 octobre). L'ancien n°1 mondial de la fourniture d'accès à Internet est désormais totalement désengagé du marché européen. Le rachat pour 288 millions d'euros d'AOL France par Neuf Cegetel s'est ainsi accompagné d'un partenariat qui voit Neuf Cegetel confier pour cinq ans à AOL l'édition et la fourniture des contenus de son nouveau portail.

En novembre 2007, la clientèle d'AOL est tombée à 10,1 millions d'abonnés, juste devant Comcast et AT&T Yahoo!

AOL abandonne son navigateur Netscape à partir du 1er février 2008. C'est la fin de l'aventure pour l'ancien navigateur Internet numéro un, pionnier du genre, dépassé puis marginalisé par son concurrent Internet Explorer de Microsoft.

Le 12 mars 2009, Jeff Bewkes, le président de Time Warner, nomme Tim Armstrong au poste de PDG d'AOL, le chargeant de regagner la confiance des investisseurs et des annonceurs. Les revenus de l'entreprise ont chuté d'environ 22 % à un peu moins de 3,3 milliards de dollars entre 2008 et 2009.

Le 28 mai 2009, l'annonce par Time Warner de sa séparation avec AOL prouve que la plus importante fusion de tous les temps, dévoilée en janvier 2000, scellée un an plus tard, est un énorme fiasco. La valorisation d'AOL, qui ne compte plus que 6,9 millions d'abonnés aux Etats-Unis est estimée à 6 milliards de dollars (4,3 milliards d'euros), soit environ la moitié de la valeur du réseau social Facebook et moins de 5 % de celle de Google, les nouvelles stars de l'Internet.

2010-2015: AOL quitte la scène

AOL redevient une société cotée indépendante le 10 décembre 2009. Huit ans après avoir quitté la bourse suite à la fusion avec Time Warner, AOL, valorisé 165 milliards de dollars en janvier 2001, ne vaut désormais plus que 2,5 milliards de dollars de capitalisation selon les estimations, avec un chiffre d'affaires de 2,4 milliards de dollars sur les neuf premiers mois de l'année ; un portail aux allures de Yahoo ; 5 millions d'abonnés à son service d'accès Internet, contre 30 millions à la grande époque ; un réseau publicitaire ; un webmail, qui a encore perdu 15% de part de marché aux Etats-Unis l'année dernière ; et des contenus en ligne : quelque 80 sites, dont le réseau social Bebo, acquis en 2009 pour 850 millions de dollars, sur lesquels l'entreprise fonde son avenir. Objectif: transformer l'entreprise, qui réalise encore 60% de son Ebitda grâce à son activité de FAI, en média.

Arrivé quelques mois avant la rupture avec Time Warner, Tim Armstrong imprime la nouvelle stratégie du groupe. Impossible pour lui de lutter avec les opérateurs télécoms et les nouveaux géants technologiques tels que Google ou Facebook. Il recentre AOL sur les médias et sur son marché domestique en conservant la puissance du portail américain et en développant les activités de régie publicitaire et de médias numériques.

La fermeture d'AOL France et d'autres pays européens est prévue à partir de 2010. L'entreprise avait uniquement conservé en France son activité de portail et sa régie publicitaire. AOL avait initié l'an dernier une importante restructuration, basée sur 2500 suppressions de postes au niveau mondial. L'entreprise annonce que 1100 départs volontaires ont déjà eu lieu et que les 1300 restants correspondent au licenciement des salariés de toutes les branches européennes d'AOL, Irlande et Royaume-Uni exceptées.

La société, qui dispose encore de quelques ressources, s'offre des enseignes réputées comme l'influent site d'information sur les technologies TechCrunch en septembre 2010 ou, en février 2011, le magazine d'actualité Huffington Post pour 315 millions de dollars. Pour AOL, l'enjeu est de réussir sa reconversion dans les contenus. A son exercice 2010, AOL a réalisé un chiffre d'affaires de 2,4 milliards de dollars, en repli de 26 % par rapport à l'année précédente, et a affiché une perte de 782 millions de dollars. Certes, le repli du chiffre d'affaires s'explique d'abord par la fermeture des bureaux européens d'AOL et par l'abandon des activités de fournisseur d'accès, mais le chiffre d'affaires publicitaires a également baissé aux Etats-Unis. Le groupe poursuit donc sa stratégie de rationalisation afin de redevenir bénéficiaire. Le 10 mars 2011, il annonce de nouvelles suppressions d'emplois dans le monde. Alors qu'il a compté jusqu'à 20000 salariés, AOL a divisé par quatre ses effectifs depuis qu'il a entrepris de se repositionner sur les contenus.

Lors du second trimestre 2011, les revenus publicitaires d'AOL ont augmenté pour la première fois depuis 2008. Les revenus d'abonnements ont par contre chuté de 23%, puisque de moins en moins de gens paient pour accéder aux services internet par ligne commutée d'AOL.

En février 2015, à la publication des résultats 2014, alors qu'AOL essaie toujours de construire un avenir autour de son activité de médias Internet, l'entreprise constate que l'activité historique d'accès Internet commuté par abonnement fournit toujours la majorité des revenus de l'entreprise. Les revenus d'abonnement d'AOL ont atteint 606 millions de dollars l'an dernier, soit environ 24% seulement des ventes globales de l'entreprise, mais le groupe " abonnés " d'AOL, qui comprend son activité d'accès commuté, a généré 562 millions de dollars de bénéfice d'exploitation l'an dernier. C'est plus de huit fois plus que le secteur des médias numériques. AOL termine 2014 avec 2,2 millions d'abonnés, soit une baisse de seulement 284 000 par rapport à fin 2013.

Le 8 mai 2015, un journaliste écrit " Cela semble fou, mais 2,1 millions de personnes aux États-Unis utilisent encore l'accès commuté AOL pour se connecter à Internet. "
" Ce chiffre figurait dans le rapport sur les résultats trimestriels d'AOL vendredi. C'est choquant, étant donné que 70% des Américains se connectent à Internet via une large bande [Broadband] beaucoup plus rapide. La vitesse moyenne du haut débit aux États-Unis est de 11,4 mégabits par seconde. C'est 200 fois plus rapide que les 56 kilobits par seconde d'un accès commuté. Même les smartphones sont plus de 100 fois plus rapides que cela. Cette connexion par modem 56k signifie essentiellement que 2,1 millions de personnes vivent le Web comme en 1995, avec des images simples qui se téléchargent lentement de haut en bas. Vous vous en souvenez ? "

En mai 2015, Verizon Communications acquiert AOL, incluant ses activités dans la publicité mobile, Huffington Post, TechCrunch et Engadget, pour 4,4 milliards de dollars. Tim Armstrong reste à son poste de PDG.

En mai 2021, Verizon annonce la vente au fonds d'investissement Apollo Global Management de ses activités dans les médias incluant les marques AOL, Yahoo ou encore TechCrunch pour 5 milliards de dollars, soit près de la moitié du montant qu'il avait déboursé pour les acquérir, tout en gardant cependant une participation de 10 % dans cet ensemble.

AOL a eu un parcours plus que chaotique et emblématique de la saga Internet.

 

HISTORIQUE DES VERSIONS AOL

AOL pour DOS février 1991
AOL 1.0 pour Windows 3.x Novembre 1992
AOL 1.0 pour Mac janvier 1993
AOL 1.5 pour Windows 3.x juin 1994
AOL 2.0 pour Windows 3.x Septembre 1994
AOL 2.5 pour Windows 3.x juin 1995
AOL 3.0 pour Windows 95 juin 1996
AOL 4.0 Juillet 1998
AOL 5.0 Septembre 1999
AOL 6.0 octobre 2000
AOL 6.0 pour Windows XP Septembre 2001
AOL 7.0 octobre 2001
AOL 8.0 octobre 2002
AOL 9.0 Optimized août 2003
AOL 9.0 Security Edition Novembre 2004
AOL 9.0 pour Vista Novembre 2006
AOL 10.0 (bureau AOL) décembre 2007
AOL 10.0 pour Mac Mai 2008

 
     

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